Valais Libre

30 Mai 2012

Loin des extrêmes point de salut

Comment les conservateurs ont conquis le pouvoir en 1857

« Il ne suffit pas de dire : nous avons perdu ; il faut dire comment on a perdu » ; alors suivons cet adage1 pour aborder quelques éléments responsables de l’échec des radicaux en 1857.

Dès 1855, nous observons le développement d’une campagne en faveur d’une collaboration entre citoyens radicaux et conservateurs, avec en ligne de mire un appel à la concorde dans le but d’effacer les derniers restes des luttes fratricides d’autrefois. C’est dans cet esprit que le Courrier du Valais, digne organe du gouvernement libéral, lance un appel à toutes les forces désireuses de constituer un groupement national, éloigné des extrêmes, pour œuvrer au développement pacifique des institutions libérales. Cette démarche de collaboration s’accompagne néanmoins d’une ferme volonté des libéraux de maintenir intégralement le contenu de leur programme, notamment la liberté de cité, la liberté de conscience et surtout la séparation complète du pouvoir religieux et du pouvoir civil2. Un acte fondé sur le désir d’établir une œuvre profitable à tous les citoyens, une intention certes louable que les radicaux paient chèrement lors des élections de mars 1857.

Alors que les libéraux tendent une main loyale à leurs adversaires politiques et tentent de les convaincre que « les réformes attendues pour amener la prospérité du pays n’ont pas de couleur politique», les conservateurs, obnubilés par l’exercice du pouvoir et surtout désireux de rassurer leurs alliés cléricaux, rejettent cette « politique de concessions mutuelles» préférant se confier aux « frêles avirons d’une majorité ». Face à ce constat, le gérant du Courrier3 déclare «il  ne nous reste plus qu’à passer la plume à une main plus habile » ; une décision assumée avec d’autant plus de détermination que cette politique de rapprochement a non seulement rencontré peu d’écho auprès des citoyens mais se trouve « condamnée par plusieurs de nos amis politiques4 ».

Le Courrier5reconnaît avoir été dupe de ses intentions généreuses à travailler à la pacification du pays. « Nous avons surestimé les promesses de nos adversaires, et jugé prématurément des hommes sur la foi de leurs paroles ; le moment actuel nous a décillé les yeux ».

Les Valaisans, de tradition catholique par nature, ne sont pas disposés à s’approprier les réformes progressistes instaurées par le régime radical ; surtout lorsque la Gazette affirme dans ses colonnes que leur « presse vivante » c’est leur « curé », que le « lieu de réunion » demeure l’église, répétant à l’envi qu’avec les libéraux, la religion est en danger ; faut-il dès lors s’étonner que des citoyens, ainsi instruits dans l’obscurantisme, se détournent des radicaux.

1 De Claude Bernard, médecin, fondateur de la médecine expérimentale.

2 Courrier du Valais, no 32 du samedi 14 mars 1857 – photo 7.4.2010/dsc01634/35.

3 M. Elie Gay.

4 Courrier du Valais, no 64 du dimanche 31 mai 1857 – photo 7.4.2010/dsc01653.

5 Courrier du Valais, no 129 du mercredi 30 décembre 1857 – photo 7.4.2010/dsc01681.

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