Qui n’a jamais entendu parler du fameux « Canadien de Montréal »? Le plus grand club de hockey du monde, en tout cas si l’on se réfère à l’histoire, a fait beaucoup parler de lui ces derniers temps. Et pas pour le mieux. Trois licenciements de hauts dirigeants d’un coup, même Constantin n’avait jamais osé. Le premier remplaçant choisi montre que le propriétaire n’a toujours rien compris.
Parlons d’autre chose que du Covid et du fameux Omicron. Le positif de cette pandémie, c’est que l’on connaîtra bientôt par cœur l’alphabet grec. Bon de delta à omicron, il manque quelques lettres, mais c’est à cause des variants inoffensifs. On n’a finalement que le mauvais côté des choses.
Un grand ménage
Je m’arrête, j’ai dit pas de pandémie aujourd’hui. Le directeur général, le chef du recrutement et le chef des communications. Trois pions importants de l’organisation du Canadien ont donc été virés le même jour. Le départ plus que catastrophique de la seule équipe de hockey de la Ligue nationale (LNH au Québec, mais NHL partout ailleurs dans le monde, à croire que nous sommes seuls dans ma nation d’exil à parler français) aura donc causé un petit séisme.
Bon, vous me direz l’entraîneur, le coach comme on dit ici, est resté en place. C’est qu’il est plus bas dans l’échelle dans le monde du hockey nord-américain que dans le football suisse. Les trois licenciés du Canadien faisaient à peu près le travail de CC au FC Sion. C’est vous dire si le coup de balai a été violent.
Pourtant inhabituel
Surtout que la chose n’est pas habituelle dans l’organisation de la « Sainte-Flanelle » (je ne vous ai pas dit, mais le hockey est une religion au Québec). Depuis mon arrivée, il y a bientôt dix ans, il y a eu 4 coachs et Dominique Ducharme qui est derrière le banc est le 35e de l’histoire du club fondé en 1909.
Une moyenne d’un peu plus de 3 ans de durée de fonction. Je n’ose même pas imaginer le résultat pour le banc de Tourbillon. Et pour les directeurs généraux, c’est encore mieux. Marc Bergevin qui vient de prendre la porte était le 17ede l’organisation. Et encore pour le départ, ils étaient deux à agir en même temps. 7 ans de moyenne, donc. J’étais à peine arrivé lors du dernier changement en mars 2012.
Une énorme erreur de jugement
Si le grand propriétaire Geoffrey Molson, un nom qui goûte la bière ici au Québec, a pris cette décision 5 mois après que son équipe ait participé à une nouvelle finale de la Coupe Stanley, 28 après la dernière, c’est à cause d’une faute grave. Et le trio congédié a collectivement participé à une erreur de jugement inadmissible.
En juillet dernier, lors du repêchage 2021, le Canadien a pris un risque incontrôlé. Qu’est-ce que le repêchage me direz-vous ? C’est un peu comme quand on tirait les équipes à l’école, sauf qu’ici, c’est plus organisé. Les dernières équipes de la saison participent à un tirage au sort pour savoir qui choisit en premier. Ensuite, à tour de rôle, ils ont le droit de se réserver un jeune espoir d’un peu partout dans le monde.
Ainsi en 2017, le tout premier choix du repêchage a été le Valaisan Nico Hischier qui joue aujourd’hui au New Jersey. Mais bon, je m’égare. Le Canadien a donc choisi Logan Mailloux en 31e position (il y a 32 équipes en LNH). Pourquoi était-ce un risque ? Tout simplement parce que ce jeune homme ne voulait surtout pas être appelé parce qu’il est accusé d’avoir partagé des photos explicites d’une femme sans son consentement.
Des excuses publiques
À l’heure de #meetoo, vous pensez bien qu’une telle chose ne pouvait passer inaperçue. Malheureusement, le monde macho du tricolore (un autre surnom des héros montréalais) n’a rien vu venir. Il pensait faire une bonne affaire, car les autres n’avaient pas osé choisir ce petit prodige du hockey.
Et il arriva ce qu’il devait arriver. Dès le lendemain, les médias, puis les fans se sont déchaînés. Le grand chef ne pouvait rester silencieux. Quelques jours plus tard, il est apparu contrit devant la presse pour expliquer que ce choix était réfléchi et que le Canadien voulait utiliser cet exemple pour sensibiliser les jeunes aux dérives de nature sexuelles.
Pas très convaincant, vous en conviendrez. Mais bon, un mois après les exploits, même si la coupe a pris le chemin de la Floride, on ne pouvait pas faire le ménage. Mais les responsables ne perdaient rien pour attendre. À voir le regard du boss lors de sa prise de parole, on pouvait deviner ce qu’il allait arriver.
Une reprise catastrophique
Au début octobre, tout était oublié. Cette année allait être celle de la rédemption, celle qui enfin verrait la Coupe Stanley revenir à la maison. 29 ans après la 25e (un record pas près d’être battu), le temps était venu. 10 matchs et 8 défaites plus tard, le doute s’installait. À l’heure où j’écris ces lignes, 25 matchs, 19 défaites et 6 victoires ont enlevé tout espoir aux partisans.
Tous les spécialistes ont fait leurs calculs, le Canadien ne peut plus participer aux séries. La saison ne compte plus. Les 57 matchs restants ne seront qu’une longue agonie. L’heure était donc propice aux sacrifices des têtes irréfléchies qui avaient terni l’image de l’organisation et de son chef.
Elles furent donc trois à rouler. Le responsable du recrutement qui avait choisi Mailloux, le directeur général qui avait validé le choix et le chef des communications qui ne les avait pas avertis du tollé que ce choix allait provoquer. Ce n’est donc pas les résultats sportifs catastrophiques qui sont importants, mais bien l’image.
Et de ce côté-là, il reste du chemin. Au moment où les scandales linguistiques se succèdent (gouverneure générale, patrons d’Air Canada qui ne parlent pas français), le big boss n’a rien trouvé mieux que d’engager un boss hockey qui ne parle pas un traitre mot de la langue de Molière pour la première fois en 112 ans d’histoire.
Et ce n’est pas parce qu’il n’a pas officiellement le titre de DG que la pilule va passer plus facilement.