31 janvier 2016
30 janvier 2016
29 janvier 2016
28 janvier 2016
Que faire de notre histoire catholique ?
Le rapport sur l’institut Marini de Montet remet en lumière les abus sexuels dont ont été victimes de jeunes enfants confiés à cet institut catholique du canton de Fribourg. Il fait surtout écho aux multiples autres cas qui sont enfin mis en lumière en Europe et en Amérique du Nord. La souffrance des victimes commence aujourd’hui à être reconnue et l’Église catholique doit faire un examen de conscience. Son héritage suscite différentes réactions.
« Je suis touché par les souffrances de ces personnes. Ces actes ont été laissés de côté et des dirigeants de l’époque étaient plus préoccupés de protéger la réputation de l’Église que le sort des victimes. » Mgr Charles Morerod a voulu rompre le silence et mettre en lumière les faits. L’évêque de Lausanne, Genève et Fribourg semble sincèrement ému et repentant.
La Suisse catholique n’est pas la seule à être victime d’actes abominables survenus dans des institutions religieuses. Le Québec sort à peine d’un procès cauchemardesque qui a mis en lumière les agissements de prêtres. Les victimes des pères rédemptoristes du Séminaire Saint-Alphonse à Sainte-Anne-de-Beaupré ont reçu des indemnités et des prêtres ont été condamnés.
Le pape François a présenté des excuses en avril 2014: « Il est de mon devoir d’assumer personnellement tout le mal que certains prêtres ont fait. Ils sont nombreux, même s’ils sont peu nombreux par rapport au nombre total de prêtres dans l’Église. En mon nom, je demande pardon pour le mal qu’ils ont fait d’avoir agressé sexuellement des enfants. »
Vivre avec cet héritage
L’histoire du Valais, comme celle du Québec est intimement liée à la religion catholique. Des deux côtés de l’Atlantique, l’Église a été au coeur du développement de la société. Aujourd’hui, ces régions doivent vivre avec cet héritage parfois douloureux. Toutefois, il me paraît injuste de jeter l’ensemble des réalisations à cause de comportements inacceptables, intolérables, inimaginables de certains.
« Il y avait un pouvoir social de l’Église catholique dans le canton de Fribourg. Cela a bien changé. Je crois que c’est une libération pour la société et pour l’Église. » Les paroles de Mgr Morerod donnent une première analyse pertinente. L’Église avait une emprise trop grande sur la société, c’est indéniable et heureusement, aujourd’hui, les choses ont changé.
Des réactions distinctes
Chaque victime, chaque peuple, chaque région réagit différemment à son histoire. C’est heureux et c’est un droit fondamental, mais il peut être intéressant de tenter de comparer ces réactions. Mon chemin me permet de jeter un regard sur le Valais et le Québec qui se sont construits sur des fondations catholiques et qui, aujourd’hui, connaissent des situations bien différentes.
En Valais, nulle surprise, l’Église a encore une place importante. Certes, l’évêque de Sion n’est plus Comte du Valais, mais son avis pèse toujours sur les débats publics. Son pouvoir temporel a disparu, mais il reste un référent et le parti dominant garde précieusement le mot chrétien dans son appellation. La société se laïcise très lentement, trop lentement diront certains. Il n’y a pas de véritable séparation entre l’Église et l’État.
Le Québec a connu sa « Révolution tranquille » au sortir de la « Grande noirceur ». Ces deux termes qui signalent deux époques de l’histoire récente de la province illustrent parfaitement l’évolution de la société québécoise.
La « Grande noirceur » est l’époque du règne de 15 ans (1944-1959) du premier ministre Maurice Duplessis qui a répondu avec des valeurs conservatrices à certaines velléités de modernisation d’une élite intellectuelle. La « Révolution tranquille » a été la réponse de la décennie suivante. Le Québec s’est laïcisé, l’État-providence a mis en place une véritable séparation entre l’Église et l’État. L’éducation et la santé ont, par exemple, quitté le giron de l’Église.
Deux évolutions différentes, fruits d’environnement différent, mais surtout de volonté populaire différente. Un demi-siècle plus tard, le bilan est mitigé des deux côtés. Les maux de collusion, de clanisme, de mauvaise gestion de l’État, d’abus de pouvoir des dirigeants, etc. sont comparables.