Dr Joseph-Hyacinthe Grilleti
Alors que d’autre se battent les armes à la main pour défendre la liberté, Joseph-Hyacinthe Grillet s’engage avec sa plume, contribuant ainsi à la naissance de la presse libérale en Valais, et avec ses convictions pour améliorer les conditions de la santé publique.
Joseph Grillet, cordonnier, originaire de Châtel-sur-Abondance, s’établit à Onion dans le Faucigny, puis à Saint-Gingolph où il épouse Marie Derivaz ; de leur union, le 25 novembre 1807, naît Joseph-Hyacintheii; il fonde un foyer avec Henriette Advocat, fille de l’imprimeur sédunois Antoine Advocat et soeur de l’imprimeur Louis Advocat.
Joseph-Hyacinthe entreprend des études de médecine et de chirurgie à Vienne puis à Berlin où il obtient un doctoratiii en 1838. Lorsque, dans le courant de 1839, il revient en Valais, il constate l’incurie du domaine sanitaire et est offusqué par les pratiques ancestrales de la médecine, conséquences du faible niveau d’instruction de la population et du peu d’importance qu’elle porte à sa santé ; il dénonce les pratiques illégales des guérisseurs et autres rhabilleurs.
Les mandats politiques
Au plan cantonal, le Dr Grillet fonctionne en qualité de secrétaire du gouvernement provisoire cantonal (1847-1848) puis il siège au Grand Conseil de 1852 à 1857 et de 1865 à 1867; conseiller communal radical à Sion (1848-1853, 1859-1860, 1865-1867) ; président de 1850 à 1853, vice-président de 1859 à 1860iv ; son engagement se manifeste notamment par des mesures d’utilité publique comme la propreté des rues, l’assainissement de certaines places, le percement des remparts ou l’élargissement des voies de circulation. Le 3 novembre 1848, le Grand Conseil valaisan, le désigne comme député au Conseil des Etatsv (avec Joseph-Henri Ducrey vi) ; lorsqu’il est élu à la présidence de la municipalité de Sion, il n’accepte pas sa réélection au Conseil des Etats et est remplacé par l’avocat Joseph Rionvii.
Instruction et santé publique
Joseph-Hyacinthe Grillet exerce la médecine à Sion et, durant la saison des eaux, à Loèche-les-Bains ; il publie par ailleurs un ouvrage sur Loèche-les-Bains, son histoire, ses sources thermales, ses divers établissements publics et ses environsviii. Son engagement pour l’amélioration de la santé publique en Valais est considérable – souvent en association avec le Dr Maurice Claivaz – nous le voyons ainsi exercer différents postes : médecin du district de Sion ; en février 1853, le Conseil d’Etat le nomme au Conseil de santéix ; il participe à la création d’une société de secours mutuel à Sion et au plan cantonal ; président de la Commission sanitaire cantonale, auteur de divers opuscules de médecine. Chirurgien en chef des milices valaisannes, il fait partie de l’Etat-major du bataillon de Landsturm du contingent fédéral de l’arrondissement du Centrex.
Sa prédilection pour l’instruction, l’amène à exercer, de 1853 à 1857, le professorat au Lycée de Sion, sous le régime qui suit la réorganisation de nos collèges, où il occupe la chaire de littérature française.
Des activités journalistiques
Joseph-Hyacinthe Grillet, conscient du rôle important que peuvent exercer les journaux dans la formation de l’opinion publique, contribue à la création et au développement de la presse libérale ; en 1843 d’abord, avec quelques libéraux modérés, parmi lesquels l’avocat Joseph Rion, Louis Ribordy, le Dr Barmanxi, il participe au lancement du Courrier du Valais, avec sa devise Union et progrès, notamment pour procéder à une information objective dans les domaines « de l’ordre, de la liberté et du progrèsxii » ; dans un des premiers numéros, le rédacteur du Courrier réclame « des hôpitaux comme on en trouve chez tous les peuples civilisés » et lance un appel à « tous les hommes véritablement amis de leur pays, à tous les citoyens sensés qui ne se contentent pas belles théories, mais veulent des réalitésxiii. »
Lorsqu’en décembre 1844, le Courrier annonce « nous mourons sous l’étreinte de fer qui étouffe notre voix » et cesse de paraître en constatant que, pour le moment en Valais, l’existence de tout organe de l’opinion franchement libérale est impossiblexiv ; néanmoins, à l’automne 1846, un organe modéré, L’Observateur, avec sa devise « Bien faire et laisser dire », précédant l’instauration du gouvernement libéral de 1847, prend la relève ; le Dr Grillet se trouve bien évidemment parmi les initiateurs de cette nouvelle feuillexv ; dans les colonnes du nouvel organe, nous découvrons les premiers débats du Grand Conseilxvi relatifs à la formation des sages-femmes et aux cours d’accouchements, des délibération qui font suite aux rapports de médecins signalant que « bien des maladies, des infirmités tirent leur source de la négligence sur cet objet »xvii. Enfin, le 2 janvier 1861, lorsque le Confédéré du Valais voit le jour sur les presses de M. Laederich à Sion, le Dr Grillet en est tout naturellement le parrainxviii et membre du comité de rédaction qui entoure Victor Dénériaz.
En 1848, M. le Dr Grillet a l’honneur d’être reçu à l’unanimité, par le Grand Conseil, citoyen valaisan, en reconnaissance des services rendus, et de son dévouement au canton dans les moments les plus difficiles. Joseph-Hyacinthe Grillet, avec les Ribordy, Barman, Rion, Calpini et consorts, a largement contribué à la naissance de la presse libérale en Valais sans oublier son engagement en faveur de la santé publique des valaisans ; nous lui témoignons notre reconnaissance. Dans la journée du jeudi 25 juillet 1867, après une lente et douloureuse agonie, il décède aux Bains de Loèche ; dans son édition du 28 juillet 1867, Le Confédéré adresse un vibrant hommage à son ancien rédacteur et celui qu’il considère comme son « guide dévoué xix. »
Pour en savoir plus :
GRILLET Joseph-Hyacinthe, Loèche-les-Bains, son histoire, ses sources thermales, ses divers établissements publics, bains, hôtels, ses environs, Genève, 1866, 279 pages.
i Le Confédéré no 60 du 28 juillet 1867 – photo « Chroniques libérales-radicales/Confédéré 1867 ».
ii Charles-Hyacinthe selon nécrologie du Confédéré !!!!!
iii « De febribus inttermitentibus ».
v Pour la législature 1848-1850.
vi Le Journal du Valais no 76 du samedi 4 novembre 1848 – photo 22.12.2009/dsc01179.
vii Courrier du Valais – No 45 du samedi 1er juin 1850.
viii GRILLET Joseph-Hyacinthe, Loèche-les-Bains, son histoire, ses sources thermales, ses divers établissements publics, bains, hôtels, ses environs, Genève, 1866, 279 pages.
ix Courrier du Valais – No 11 du dimanche 6 février 1853 – photo 2.03.2010/ dsc01491.
x [note 146 et 148 p. 206 «Les aventures de ma vie (1822-1855) » in Annales valaisannes, 1994, p. 161-230.
xi BERTRAND J.-B., « Au berceau de la presse valaisanne », in Annales valaisannes, 1931, p. 39 et IMHOFF Léon, « Une grève dans l’imprimerie à Sion en 1845 » in Annales valaisannes, 1946, vol. 6, p. 143-152. [sauvegardé chez rg] [utile pour histoire des journaux].
xii BERTRAND j.-b, Le Valais – Etude sur son développement intellectuel à travers les âges ; p. 80.
xiii Courrier du Valais, no 6 du 18 janvier 1843 – photo 13.01.2010/DSC01233.
xiv Courrier du Valais, no 98 du 31 décembre 1844 – photo 19.01.2010/dsc01299.
xv COURTHION LOUIS, « Histoire de la presse valaisanne » in Wissen un Leben, 1911, cahier 12-14, p. 850.
xvi Sessions des 17, 18, 19 et 20 novembre 1846.
xvii L’Observateur no 12 du 21 novembre 1846 – PHOTO 15.12.2009/DSC01093/94.
xviii Le Confédéré du 15 novembre 1913.
xix Le Confédéré no 60 du 28 juillet 1867 – photo « Chroniques libérales-radicales/Confédéré 1867 ».