Valais Libre

26 novembre 2022

Dix ans au Québec – épisode 37

Filed under: k. saga québécoise — vslibre @ 6 h 34 min
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Il y a dix ans, je découvrais un sport qui m’est devenu aujourd’hui familier. Il commence également à se faire connaître en Europe puisque des matchs y sont de plus en plus régulièrement organisés. Après l’Angleterre, l’Allemagne commence à y goûter. Il existe même un championnat suisse, et ce, depuis 1982. Je ne le savais pas jusqu’à aujourd’hui.

Ce sport mystérieux est le football américain. Enfin, le football comme on dit dans ma nouvelle région. Rien à voir avec le soccer qui occupe tous les esprits actuellement avec la Coupe du monde où, pour la deuxième fois, après 1986, le Canada est qualifié. Il ne faut pas confondre le football américain et le football canadien.

L’un se joue à onze contre onze et on a quatre essais pour faire avancer le ballon de dix verges (yards, 91,44 cm), l’autre à douze contre douze et on a trois essais pour faire avancer le ballon de la même distance. Les Canadiens utilisent plus de monde pour amener en moins de tentatives le ballon sur la même distance.

Je sais, vous n’avez rien compris. Vous êtes dans la même situation que moi lorsque je me suis retrouvé au bord du terrain du Rouge et Or de l’Université Laval à Québec. Si un collègue photographe ne m’avait pas agrippé par le bras, c’eût pu être ma dernière partie. Je n’avais pas vu venir droit sur moi la foule déchaînée des joueurs avides de ballon.

Sans connaître les règles, difficile d’anticiper les jeux. En fait, elles sont simples. Deux équipes de 12 joueurs se battent pour amener le ballon dans le but adverse ou le faire passer entre les poteaux (3 points). Pour marquer 6 points, il faut pénétrer en tenant le ballon dans la zone de but ou le recevoir dans cette même zone. Pour y parvenir, on peut faire progresser le ballon soit en se faisant des passes, soit en le portant. La transformation qui suit vaut 1 point si on arrive à botter le ballon entre les poteaux.

Ça paraît simple, mais l’équipe qui n’a pas le ballon va chercher à intercepter les passes ou à faire tomber le porteur du ballon. Dès que celui-ci a trois parties du corps qui touchent le sol (les deux pieds et une main par exemple), le jeu s’arrête. Dans le système canadien, l’équipe qui attaque a trois essais pour que le ballon progresse de 10 verges (4 essais aux USA). Si elle y parvient, on repart pour une nouvelle séquence offensive, si elle échoue, l’équipe adverse passe à l’offensive.

Je vous passe les autres détails. Il faut juste savoir que les coéquipiers du porteur du ballon vont tout faire pour empêcher les adversaires de l’atteindre. Et quand je dis tout faire, c’est vraiment tout! Quand un beau bébé de près de 300 livres (environ 140 kilos) vous barre le passage, c’est impressionnant.

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25 novembre 2022

Les liaisons dangereuses entre le Canada et la Chine

Filed under: 1. Lettre québécoise — vslibre @ 5 h 31 min
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La Chine et le Canada sont deux pays bien plus proches de ce que l’on peut imaginer depuis l’Europe. Il n’y a finalement qu’un océan Pacifique pour les séparer. Ce mois de novembre aura mis en lumière toute la complexité d’une relation tout sauf naturelle. Le premier ministre canadien Justin Trudeau a dû sortir de son admiration béate pour réagir face à des scandales peu flatteurs.

Peu de Canadiens le savent, mais les deux langues les plus parlées à la maison après l’anglais et le français sont le mandarin et le cantonais. Cette statistique démontre plus que tout l’importance de la population aux origines chinoises au Canada. Je l’ai constaté dès mon arrivée au pays, il y a dix mois, c’est toujours un Chinois ou une Chinoise qui tient un dépanneur!

Certes, mon constat est un peu exagéré, mais je pourrais parler aussi d’un des plats traditionnels de l’hiver québécois : le pâté chinois. Non, on n’écrase pas de Chinois pour le confectionner. C’est simplement un hachis parmentier avec un étage de maïs en crème en plus. Son nom vient des ouvriers chinois qui ont construit le chemin de fer transcanadien au 19esiècle. Il se nourrissait essentiellement de ce plat nourrissant et peu coûteux.

Des liens commerciaux importants

« La Chine est le deuxième partenaire commercial bilatéral du Canada. » Ainsi commence la page internet du gouvernement canadien qui présente les échanges sino-canadiens. De l’agriculture aux sciences de la vie en passant par les technologies de l’information, l’automobile ou encore les mines et l’aérospatiale, beaucoup de domaines stratégiques font l’objet de ces transactions.

Pour le Québec aussi, la Chine est un partenaire commercial important, comme pour le Canada, c’est de deuxième partenaire après les États-Unis. Si les minerais et la viande de porc constituent la majorité des cinq milliards de biens exportés, les véhicules, les pièces d’aéronautique et le matériel informatique et de communication forment la majorité des onze milliards de marchandises importées.

La fin d’une lune de miel aveugle

Il y a longtemps que je ne comprends pas le regard béat porté sur l’empire du soleil levant par le gouvernement canadien. Les liens historiques dus à la forte immigration chinoise du 19e siècle ne peuvent expliquer cette naïveté. L’arrestation en 2018 de la directrice financière de Huawei, Wanzhou Meng, recherchée par les États-Unis a été une première étape de la détérioration des liens.

En guise de rétorsion, la Chine a arrêté deux ressortissants canadiens qui n’avaient rien demandé. La crise a duré trois ans avant qu’un échange de prisonniers n’ait lieu. Bien sûr, pas comme dans les films. Non, un accord avec les États-Unis a permis à Madame Meng de rentrer en Chine. Comme par miracle, quelques jours plus tard, les charges contre les Canadiens étaient abandonnées.

Élections et espionnage

Le calme entre les deux pays n’aura duré que quelques mois. Ces derniers jours, des ingérences chinoises dans les procédures électorales canadiennes ont été révélées. « L’agence d’espionnage canadienne aurait découvert que le consulat de Chine à Toronto pilotait un stratagème de transfert clandestin de fonds destinés à un réseau d’au moins 11 candidats aux élections – libéraux comme conservateurs – et à des agents de Pékin qui étaient à l’emploi de leur campagne », écrivait le Global News.

Le lendemain, un employé d’Hydro-Québec était arrêté. « Yuesheng Wang, âgé de 35 ans, a comparu lundi devant la Cour du Québec à Longueuil, par vidéoconférence depuis le quartier général de la GRC à Montréal, avec l’aide d’un traducteur. Ce résidant de Candiac a été accusé d’avoir obtenu un secret commercial au profit de la Chine », pouvait-on lire dans Le Devoir du 15 novembre dernier.

Finalement, Justin Trudeau a enfin élevé la voix lors de la rencontre du G20 en Indonésie. Il a réussi à fâcher le président Xi. Un bel exploit pour le gentil Justin. Peut-être que dorénavant le Canada jugera la Chine avec un œil moins bienveillant. L’annonce d’une politique indo-pacifique arrive enfin après sept ans de règne libéral. Il est temps qu’une stratégie définisse la politique canadienne du côté du Pacifique.

19 novembre 2022

Dix ans au Québec – épisode 36

Filed under: k. saga québécoise — vslibre @ 6 h 29 min
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Il y a dix ans, j’ai eu l’occasion de manger à la meilleure table de la ville de Québec : au Saint-Amour sur la rue Sainte-Ursule. Dix ans plus tard, le chef est toujours le même. Jean-Luc Boulay est une institution dans la Capitale nationale. C’est invité par l’ambassadeur de Suisse au Canada et le consul de Suisse à Montréal que j’ai eu ce bonheur.

Si le Saint-Amour est le garant d’une cuisine traditionnelle au service raffiné avec un protocole presque digne de Bocuse (pour parler des restaurants que j’ai eu la chance de découvrir), le chef Boulay en possède un autre à Québec, Bistro Boréal, plus axé sur la cuisine moderne nordique.

J’ai aussi eu le privilège de le fréquenter, invité par Swiss Wine. L’immigration, c’est aussi des invitations improbables. Ce n’est pas mon passé politique qui m’a valu de découvrir ces hauts lieux de la gastronomie. C’est tout simplement des rencontres fortuites et surtout ma maîtrise de la raclette.

En effet, un Québécois que j’ai connu au curling organisait un salon des vins suisses. Ayant ainsi connaissance de cet événement, je m’y suis intéressé. Philippe Varone présentant des vins et n’ayant personne sur place, je me suis trouvé un travail Swiss Wine organisant une raclette, un tablier enfilé, j’étais derrière les fourneaux.

Le consul de Suisse à Montréal d’alors, un Lausannois qui adorait la raclette, a très vite sympathisé avec moi. Je me suis retrouvé attablé quelques mois après au Saint-Amour. Trois ans et deux salons des vins plus tard, c’est Swiss Wine qui m’invitait au Bistro Boréal.

Comme quoi, il est toujours bon de maîtriser des techniques traditionnelles comme la raclette!

18 novembre 2022

La santé est un enjeu de compétence au Canada

Filed under: 1. Lettre québécoise — vslibre @ 5 h 26 min
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La dernière chicane provinciale – fédérale au Canada concerne la santé. C’est loin d’être une nouveauté. Depuis mon arrivée dans le pays, à intervalle régulier, la problématique des transferts en santé vient au-devant de la scène. La répartition des rôles dans la Confédération canadienne (fédération serait plus juste) n’est ni aussi claire qu’en Suisse ni aussi limpide que veut le laisser croire la constitution.

L’article 91 de la Loi constitutionnelle de 1867 confère au gouvernement fédéral de larges pouvoirs pour légiférer en faveur de la paix, l’ordre et le bon gouvernement du Canada en ce qui a trait à toutes les questions qui ne relèvent pas des catégories de sujets de la présente loi exclusivement attribuée aux législatures des provinces ». Un principe directeur des Pères de la Confédération est que la juridiction sur les questions d’intérêt national serait attribuée au Parlement. Celles d’intérêt régional seraient confiées aux provinces.

Ce paragraphe tiré de l’encyclopédie canadienne résume parfaitement l’état des choses. Des principes datant du 19e siècle qui laissent une grande place à l’interprétation. Le domaine de la santé en est un qui cause régulièrement des maux de tête tant au premier ministre du Canada qu’à ceux des dix provinces.

En dérive depuis cinquante ans

« Notre système de santé est fondé sur de grands principes convenus il y a une cinquantaine d’années. À l’époque, les provinces et le fédéral ont conçu une assurance maladie universelle, publique, gratuite et transportable d’une province à une autre.

Les médecins n’étaient pas obligés d’y adhérer, mais on ne pouvait pas avoir un pied dans le système et l’autre en dehors; si un médecin était dans le système, il n’y avait qu’un seul payeur, et c’était la province.

Au début, c’était clair et simple: le fédéral payait 50% du système et les provinces, l’autre 50%. De nos jours, l’apport du fédéral est plus proche de 25%, avec 75% des coûts assumés par les provinces. »

En quelques lignes, l’ancien député fédéral du Nouveau parti démocrate (NPD, la gauche canadienne), Thomas Muclair décrit parfaitement les causes de l’affrontement permanent entre provinces et fédéral.

Un dialogue de sourds

« On n’a pas été capable de savoir ni les montants ni les conditions. Alors aujourd’hui, on a dit qu’on ne peut pas aller plus loin », a lancé le ministre québécois de la Santé, Christian Dubé, au sortir des négociations du début du mois de novembre.

Le ministre fédéral de la Santé, Jean-Yves Duclos a déploré que, « malgré le geste d’ouverture que nous avons posé, les collègues provinciaux et territoriaux [de la santé] aient reçu l’ordre de leurs premiers ministres de ne pas faire de progrès supplémentaires ».

« Les premiers ministres provinciaux forcent mes collègues à ne parler que d’une seule et même chose : l’argent. »  En réclamant simplement une hausse de 22 % à 35 % du financement fédéral sans condition, comme ce fut le cas par le passé, les provinces se bornent à « l’ancienne façon de faire les choses ».

Un outil de pression du fédéral

La tactique immuable du fédéral est de diviser les provinces en jetant de l’huile sur le feu, en démonisant certaines pour mieux s’entendre avec d’autres. A ce jeu, le Québec est une cible facile pour Justin Trudeau. Il n’a d’ailleurs pas hésité à critiquer certaines mesures n’ayant rien à voir avec la santé, comme les chèques québécois pour aider à faire face à l’inflation, pour détourner le débat.

«Je n’en reviens pas que M. Trudeau vienne dire que M. Legault ne devrait pas aider les Québécois à faire face à l’inflation. Rappelons que le Québec est l’endroit où les impôts sont les plus élevés. À un moment donné, il faut être capable aussi de bien comprendre les enjeux et ne pas faire des batailles inutiles », a indiqué M. Dubé, ministre québécois de la Santé.

Il insistait pour dire que les dépenses de santé sont celles qui augmentent le plus rapidement au pays en raison du vieillissement de la population.  « Le gouvernement fédéral finance seulement 22% des dépenses de santé des provinces et pourtant, il reçoit 40% des impôts. Alors il faut qu’il fasse sa part ».

Ainsi, le chantage et les enfantillages sont incessants. C’est inévitable lorsqu’on vit avec des règles d’un autre millénaire.

12 novembre 2022

Dix ans au Québec – épisode 35

Filed under: k. saga québécoise — vslibre @ 5 h 58 min
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Il y a dix ans, je recevais le commandant de la police valaisanne à manger chez moi à Saint-Jean-Chrysostome. Il faut dire que Christian Varone est un ami. Nous venons de la même commune et il est à peine plus âgé que moi. C’est donc tout naturellement que nous avons partagé un repas. Je l’ai également suivi dans les conférences qu’il donnait à Québec.

Invité par le Centre de Recherche et d’Innovation en Sécurité civile du campus Notre-Dame-de-Foy à Saint-Augustin-de-Desmaures, Christian passait quelques jours à Québec pour parler à des pompiers, des secouristes et des policiers en formation. Quelques mois après le terrible drame du tunnel de Sierre où 28 personnes, dont 22 enfants, avaient perdu la vie, son analyse de l’intervention des secours passionnait son auditoire.

C’est aussi ça la vie d’un immigré, la rencontre d’un ami qui fait remonter les souvenirs d’enfance, un moment de partage où il fait bon jaser du temps jadis. C’est aussi cette même rencontre qui met en relief la distance. Je me souviens encore de mon émotion en mars 2012. Deux mois à peine après mon installation au Québec, une tragédie secouait ma terre natale.

Je me suis parfois demandé comment j’aurais traité l’affaire. Quelle place aurais-je donné dans le Confédéré à ce fait tout sauf divers? Ma sensibilité m’aurait-elle permis d’affronter froidement la cruelle réalité du décompte des victimes? En entendant le commandant de la police cantonale raconter son arrivée sur les lieux de l’accident, j’avais les yeux humides comme tous les autres auditeurs.

Je que je sais par contre, c’est que j’étais bien heureux quelques mois plus tard de ne pas être en Valais pour les élections cantonales 2013. Pas parce que j’aurais pu éviter la non-élection de Christian au Conseil d’État, mais parce que je n’avais pas eu besoin de régler les conflits d’intérêts entre le président du PLR de Savièse et le secrétaire cantonal de ce même parti. Je n’étais plus ni l’un ni l’autre. La distance peut aussi faciliter les choses.

11 novembre 2022

Quand les principes du 19e siècle commandent

Filed under: 1. Lettre québécoise — vslibre @ 5 h 54 min
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L’Amérique du Nord voue une dévotion aux gouvernements du passé difficile à comprendre. Les constitutions sont des textes quasi bibliques et on ne saurait les changer. Je laisse les États-Unis et leurs règles qui remontent au 18esiècle en ce qui concerne le droit de se défendre pour parler un peu du Canada. La mort de la reine Élisabeth n’a pas tardé à déclencher le débat monarchique dans mon nouveau pays.

Enfin, quand je parle de mon nouveau pays, c’est du Québec que je parle. Vous me connaissez bien maintenant. De mon côté, lors de ma naturalisation, j’ai prêté serment à la reine Élisabeth II, à ses descendants et à ses successeurs. Je suis donc tranquille. Ce n’est pas le cas des députés fraîchement élus.

Les péquistes sèment le trouble

 « J’ai signifié à l’Assemblée nationale mon intention de ne pas prêter serment d’allégeance au roi d’Angleterre et de m’en tenir uniquement au serment d’allégeance envers le peuple québécois prévu à l’article 15 de la Loi sur l’Assemblée nationale.

Depuis que j’ai fait connaître publiquement cette intention, de nombreuses voix se sont fait entendre dans la société civile pour que tous les élus emboitent le pas et mettent fin à cette mascarade humiliante, en refusant eux aussi de prêter serment au roi. Un grand nombre de juristes et de constitutionnalistes ont également pris la parole pour signifier qu’à leurs yeux, l’Assemblée nationale n’a pas l’obligation de sanctionner un élu qui refuserait de prêter serment au roi d’Angleterre, en l’empêchant de siéger. » Paul Saint-Pierre-Plamondon a écrit ces mots dans une lettre adressée au porte-parole de Québec solidaire.

Il faut dire que la formation de gauche et ses onze députés ont fait comme les trois péquistes. Ils ont prêté serment au peuple québécois, mais pas au nouveau roi du Canada Charles III. 

La guerre est déclenchée

« Le serment d’allégeance visé à l’article 128 de la Loi constitutionnelle de 1867 est obligatoire pour prendre part aux travaux parlementaires », a déclaré François Paradis encore président de l’Assemblée nationale jusqu’au 29 novembre, date de l’ouverture de la prochaine législature.

Le député de la Coalition avenir Québec ne se représentait pas aux dernières élections, mais il est tout même intervenu dans le débat. « Je donne l’ordre formel à la sergente d’armes de veiller à ce que la présente décision soit appliquée de manière que les députés qui n’ont pas prêté serment ne puissent prendre place dans la Salle de l’Assemblée nationale ou dans l’une de ses commissions. Dans le cas où une personne refuserait de se plier à cette interdiction, la sergente d’armes sera légitimée de l’expulser. »

Cette déclaration non sollicitée a suscité une réplique immédiate des élus du PQ. « On ne devrait pas questionner ceux qui se tiennent debout, on devrait questionner ceux qui s’écrasent. Le gouvernement de la CAQ a clairement indiqué dans le passé qu’il voulait mettre fin aux liens avec la monarchie. C’est maintenant que ça se passe, les trois quarts de la population sont avec nous », a rapidement rétorqué Pascal Bérubé, député péquiste de Matane-Matapédia.

S’il n’en reste qu’un…

Face à l’intransigeance du parti majoritaire, Québec solidaire est rapidement rentré dans le rang. «La décision du président de l’Assemblée est très décevante, mais elle est claire et sans appel: pour corriger cette injustice pour de bon, il faut adopter un projet de loi. Québec solidaire ne fait pas confiance aux deux partis fédéralistes pour faire ce travail. Quand on veut changer les règles du jeu, on ne peut pas s’en remettre aux autres. Il faut le faire soi-même. Nous allons prendre nos responsabilités, entrer au Salon bleu (la salle où siègent les députés), et nous assurer que plus personne ne soit obligé de faire ce serment humiliant. »

Il ne reste donc plus que le Parti Québécois pour se tenir debout. Les pressions sont grandes pour qu’il prononce ce serment, même s’ils n’y croient pas. Beaucoup aimeraient que l’hypocrisie continue, qu’on prête un serment sans volonté. À quoi bon s’énerver pour des paroles inutiles ? J’espère qu’ils tiendront leur bout, qu’ils se fassent expulser du Salon bleu pour qu’on voie enfin que la monarchie n’a aucun sens au Québec.

Ce ne sera qu’un symbole, mais les symboles sont importants parfois.

5 novembre 2022

Dix ans au Québec – épisode 34

Filed under: k. saga québécoise,Uncategorized — vslibre @ 12 h 31 min
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Il y a dix ans, je découvrais mon premier automne québécois. Même si j’aime l’hiver, l’automne, son début en tout cas, est un moment exceptionnel. Joe Dassin l’avait chanté dans ma jeunesse, je le connais bien maintenant cet été indien. En fait si on veut être précis, c’est l’été des Indiens. La nature n’est nulle part ailleurs aussi scintillante.

L’été des Indiens est nommé ainsi parce que c’était le signal pour les populations autochtones que leur estivage se terminait. Si dans les Alpes on monte en altitude l’été, sur la côte nord du fleuve Saint-Laurent, les Innus descendaient vers le sud à la belle saison. Ils venaient vers le fleuve, puis vers les villages des colons pour vendre leurs peaux et s’adonner à la confection de différents ustensiles et outils.

Avant les années soixante et la sédentarisation de ces tribus, quand les feuilles éclataient de couleurs, l’heure était venue de préparer le départ. En hiver les populations montaient vers le nord, là où les troupeaux de caribous étaient nombreux, là où la chasse allait permettre de résister sans trop de peine. Car la saison froide était vraiment froide. Heureusement, les Innus sont passés maîtres pour apprivoiser l’hiver, survivre dans des températures pouvant descendre jusqu’à moins cinquante. Une tente de peau et un bon feu ajouté à de la fourrure facilitent la survie. L’hiver était leur saison qui leur procurait de la subsistance presque pour toute l’année.

Aujourd’hui, les hivers sont plus faciles. Je n’ai jamais vu plus bas que moins trente-six, mais c’est rare. Alors je profite des dernières couleurs avant de retrouver mon râteau pour ramasser des montagnes de feuilles. La face cachée de l’été des Indiens est aussi une occasion de rencontres entre voisins une ultime fois avant d’entrer en hibernation.

L,automne vu de ma fenêtre de Lévis. Source: PM

4 novembre 2022

Quand l’électricité est nationalisée

Filed under: 1. Lettre québécoise — vslibre @ 6 h 23 min
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Hydro-Québec est une fierté de la Belle province. Avec raison. Je n’ai jamais été un adepte des nationalisations, mais je dois avouer que le système fonctionne pour l’électricité. À l’heure où les tarifs explosent en Europe, où, en Suisse, les grands consommateurs veulent revenir dans un marché régulé, il vaut la peine de regarder de plus près le dispositif québécois.

« La création d’Hydro-Québec est un moment marquant de notre histoire qui a contribué à notre affirmation identitaire et qui suscite encore aujourd’hui une immense fierté parmi les Québécois. La création de cette institution est par ailleurs associée à de grands noms qui ont joué un rôle important dans l’évolution du Québec. Je suis heureuse que, par son inscription dans le Registre du patrimoine culturel, cet événement soit officiellement gravé dans notre mémoire collective. »  Ces paroles étaient prononcées par Nathalie Roy, ministre de la Culture et des Communications, au terme de l’année jubilaire 2019 qui célébrait le 75e anniversaire d’Hydro-Québec.

Un peu d’histoire

C’est donc le 14 avril 1944, en pleine Deuxième Guerre mondiale, que le gouvernement du Québec fondait la société d’État. Le premier ministre Adélard Godbout, le même qui accepta de donner le droit de vote aux femmes, nationalisait l’entreprise Montreal Light Heat and Power Consolidated. En prenant possession du marché montréalais de l’électricité, le Québec favorisait alors l’amélioration du service et l’extension du réseau de distribution. Mais le reste de la province était approvisionnée par des compagnies privées.

Si vous demandez à un Québécois qui est le créateur d’Hydro-Québec, l’immense majorité vous répondra: René Lévesque. Ils ont oublié l’épisode Godbout de 1944. Car, c’est en 1963 que le ministre des Richesses naturelles du Parti libéral du premier ministre Jean Lesage, un certain R. Lévesque, réussit à convaincre qu’il fallait compléter le processus de nationalisation de l’électricité.

Celui qui fondera le Parti québécois quelques années plus tard permet à Hydro-Québec d’acquérir et d’intégrer à son réseau les actifs de 11 compagnies privées d’électricité. La nationalisation de l’électricité favorise l’émancipation économique du Québec. Sous l’impulsion d’Hydro-Québec, le Québec acquiert une expertise reconnue à l’international en matière d’hydroélectricité. 

Un moteur économique

Dès lors, la compagnie va devenir une source non seulement d’énergie, mais aussi de vitalité économique. La construction des grands barrages du nord du Québec pourra commencer. Le barrage Daniel Johnson, le barrage des chutes Churchill au Labrador, le projet de la Baie-James, les barrages sur la rivière Manicouagan et des Outardes ou encore sur la rivière de la Baleine, font d’Hydro-Québec un des plus grands constructeurs hydroélectriques du monde.

Tous ces projets permettent à la société de devenir un des leaders du marché nord-américain. Mais tout ne se fait pas sans heurts. Des idées de lignes à très haute tension (les fameuses THT bien connues maintenant des Valaisans) sont différés ou arrêtés par des associations écologiques ou autochtones. Malgré cela Hydro-Québec reste un fleuron économique.

Amour haine avec l’État

La société d’État se veut indépendante, mais avec un actionnaire unique, l’État du Québec, la notion est très théorique. Les différents PDG d’Hydro comme l’appelle les Québécois, doivent jongler entre fournir une énergie à un tarif abordable et apporter d’importants dividendes aux caisses de l’État. Un paradoxe difficile.

Surtout quand en plus, ces dernières années, les énergies renouvelables, solaires et surtout éoliennes, viennent compliquer les choses. Les divers gouvernements du Québec ne se sont jamais gênés pour demander (ordonner) à Hydro-Québec de développer des projets dans les régions défavorisées économiquement. Et cela à n’importe quel prix.

Aujourd’hui, le tarif de base pour les particuliers oscille entre 6,3 et 9,7 cents canadiens le kWh selon la consommation (entre 4,6 et 7,1 centimes en CHF). Je vous laisse comparer, les tarifs sont tellement divers en Valais. Ils sont nettement les moins chers en Amérique du Nord.

L’eau étant abondante au Québec, il serait idiot de ne pas en profiter. Pas de redevance ici, mais des prix abordables pour tous. Finalement, cette nationalisation est assez réussie,

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