Dans l’actualité récente de mes deux régions, la question de l’efficacité de la police en situation de crise a occupé le devant de la scène. Comme un miroir Québec et la Suisse ont eu à discuter d’interventions policières pour le moins « douteuses ». Disons que ce n’était pas Police Académie, mais il y avait un peu de ça.
Si la place Fédérale à Berne et la mise en danger de nos précieux parlementaires prêtent plutôt à sourire, l’aventure québécoise est un peu plus triste. Une enquête publique revenait presque deux ans après sur la funèbre disparition de deux jeunes enfants tués par leur père qui s’est ensuite suicidé.
À la mémoire de Romy et Norah
Le 8 juillet 2020, Martin Carpentier quitte son domicile, un jumelé de la région de Lévis avec ses deux filles pour aller manger une glace. « Gaëtane, je vous ramène les enfants à 21 h, mais j’aimerais ça y aller tout seul avec les filles », lance-t-il à sa voisine qui est aussi la grand-mère des enfants, la mère de son ex-conjointe. Il ne reviendra jamais.
Il aura un accident sur l’autoroute où on trouvera sa voiture vide dans la soirée. Il s’enfuit avec ses filles dans un boisé. Une alerte est lancée. Trois jours plus tard, on retrouvera le corps des deux fillettes, puis douze jours après la disparition celui de Martin.
Une polémique sur la qualité de l’intervention policière se lance assez rapidement. Le fait d’avoir attendu 18 heures avant le déclenchement d’une alerte enlèvement pose question. Plus d’une année plus tard, l’enquête du coroner relève de nombreuses défaillances. Le ministère de la Sécurité du Québec ordonne une enquête publique.
Elle vient d’avoir lieu. Elle met en évidence de gros dysfonctionnements au niveau de la communication. La police est d’abord sûre que Martin Carpentier n’est pas un danger pour ces filles. Son entourage, même son ex-conjointe ne le juge pas violent. Pourtant la grand-mère parlera d’anxiété. Le jour de la disparition, il avait reçu les papiers du divorce.
En pleine pandémie, le jeune homme a complètement perdu pied de peur de perdre la garde de ses enfants. Peur irraisonnée, lui disait sa belle-mère, mais personne n’a alors fait le lien. Il aura fallu attendre 18 heures pour que les recherches s’orientent vers un enlèvement.
Un homme attaque le Palais
Laissons ce drame et venons-en à la comédie bernoise. Un forcené montheysan, c’est comme ça qu’il a été décrit, a donc mis le Palais fédéral sens dessus dessous. Un uniforme militaire, quelques traces d’explosif décelé par une analyse douteuse, une voiture abandonnée et nos précieux parlementaires ont été mis en alerte.
Évacués, peu informés, laissés à l’abandon sur une placette en plein air. La Suisse a évité le pire. Des terroristes bien organisés auraient pu faire un carnage. Heureusement, ce n’était qu’un jeune homme fragile psychologiquement qui pensait recevoir un grade militaire. Je crois que certains responsables de la sécurité auraient plutôt dû perdre le leur.
Il n’y aura pas d’enquête publique, la formule ne fait pas partie de la législation helvétique, mais il faudra bien savoir pourquoi tant de cafouillage, pourquoi la présidente du Conseil des États a été oubliée dans son bureau, pourquoi l’analyse a révélé des traces d’explosifs finalement introuvables, pourquoi n’a-t-on pas su que la personne mise en cause avait des problèmes psychiques, pourquoi… ?
Car c’est là le point commun de ces deux histoires : la santé mentale. Le Québec a une très grande avance sur la Suisse dans ce domaine. Pourtant ce n’est pas encore suffisant.