Valais Libre

27 mars 2020

Dans les crises, les hommes se révèlent

Filed under: 1. Lettre québécoise — vslibre @ 8 h 05 min
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Le Coronavirus qui submerge le monde actuellement crée une crise sans précédent. La pandémie n’a pas de frontière et frappe sans discernement. Le Québec est avec un temps de retard, aussi touché que la Suisse. La vie est irréelle, comme au ralenti. Dans cette atmosphère inconnue l’homme et la femme sont obligés de se révéler dans ce qu’ils sont véritablement.

On pourrait faire de la sociologique des groupes, des communautés pour étudier le comportement des différents peuples, des différents états. Ce n’est pas mon propos ici, je laisse ça pour plus tard, après la crise. Je vais m’attarder à analyser nos dirigeants, car ce sont eux qui donnent le ton, qui ont la difficile tâche de nous guider dans ce moment difficile.

Quelques exemples historiques

Georges Clemenceau n’aurait jamais été le « Père la Victoire » sans la Première guerre mondiale. Il serait resté « le premier flic de France », comme il se nommait, hait de toute la gauche française, s’il la guerre ne l’avait pas révélé au soir de sa vie, il avait 76 ans lorsqu’il reprend la tête du Conseil qui gouvernait la France en 1917.

« Je n’ai rien d’autre à offrir que du sang, du labeur, des larmes et de la sueur ». Winston Churchill, ne serait resté qu’un obscur ministre anglais plutôt dans la moyenne s’il n’avait pas eu la Deuxième guerre mondiale qui lui a permis de magnifier son leadership. Il a prononcé sa célèbre phrase à 66 ans lorsqu’il est devenu premier ministre. 

En Suisse, jamais le général Guisan n’aurait marqué l’histoire du pays sans cette même Deuxième guerre mondiale. Aucun chef militaire n’a sa place dans l’opinion publique en dehors des périodes de crise. Le grade de général n’existe d’ailleurs pas en temps de paix. Lui aussi, à 66 ans, s’est sublimé face aux événements et a su mobiliser et unifier la nation dans un moment critique.

Un Canada flou et indécis

Justin Trudeau apparaît esseulé tous les jours devant sa résidence à Ottawa. Les journalistes se tiennent à 6 mètres à cause du retrait observé à cause de la Covid-19 de l’épouse du premier ministre. Source : radio-canada.ca

Nous vivons actuellement une période de crise comme nous n’en avons plus vécu depuis la Deuxième guerre mondiale et cette crise révèle aussi la vraie dimension de nos dirigeants. Au Canada, qui est une confédération, comme la Suisse, nous avons droit à deux figures bien différentes : un premier ministre fédéral maladroit et indécis et un premier ministre provincial ferme et convaincant.

Justin Trudeau, je vous l’ai déjà dit, est devenu premier ministre parce qu’il est le fils de Pierre Eliott Trudeau. Sans cela, ce professeur de théâtre ne serait jamais sorti de son rôle. Reclus dans sa résidence car son épouse est atteinte de la Covid-19, en retrait, il n’apparaît pas comme un chef convaincant.

Indécis, en retard, on n’a pas le droit de venir 39 minutes en retard pour une conférence de presse diffusée en direct dans tout le pays ! Justin Trudeau n’a pas trouvé le ton juste. Il est flou dans ses explications et change drastiquement ces décisions d’un jour à l’autre. L’exemple de la frontière avec les États-Unis est flagrant. Un jour c’est une très mauvaise idée de fermer les frontières, le lendemain on les ferme toutes sauf avec les États-Unis, un jour plus tard, on ferme celle-là aussi. Rien pour rassurer la population.

Un Québec chaleureux et rassurant

Au Québec, François Legault se présente quotidiennement entouré du directeur national de la Santé publique Horacio Arruda et de la ministre de la Santé Danielle MacCann qui répondent avec beaucoup de précision et d’humanité. Source radio-canada.ca

Tout un contraste avec François Legault, le premier ministre du Québec qui se révèle comme un grand homme d’État. Je me souviens que lors de mon arrivée au Québec (janvier 2012), la Coalition avenir Québec (CAQ) venait d’être fondée (14 novembre 2011). Son chef était surnommé « on verra » à cause de ses premières réponses aux journalistes.

Aujourd’hui, c’est Horacio Arruda, le directeur national de la Santé publique qui ose glisser la formule lors de ses réponses à la conférence de presse quotidienne. Un autre personnage qui a le ton juste cet Horacio. Mais revenons à François Legault. Il a su, dès le début de la crise parler vrai aux Québécois.

Je le soupçonnais d’être un homme politique qui s’investit pour les bonnes raisons avant cette crise, mais là, il éclate vraiment et fait l’unanimité. Quel contraste avec Justin Trudeau. Il sait être ferme et rassurant. Il sait surtout s’entourer, ne pas apparaître seul aux commandes. On sent que c’est lui qui dirige, mais on sent surtout qu’il sait écouter.

Ne pas apparaître seul

Car si les exemples que je citais au début reste dans la mémoire collective comme des dirigeants solitaires, les temps ont changé. Aujourd’hui, le groupe est important. Nous voulons des leaders qui, en temps de crise, sont aux commandes, mais bien entourés. C’est visiblement le cas au Québec, très douteux au Canada.

La Suisse a la chance d’avoir un collège gouvernemental. Cette richesse est précieuse, même si quand tout va bien on aimerait que les choses aillent plus vite. Aujourd’hui, de loin, je sens un gouvernement bien à ses affaires. Quand Alain Berset encourage la responsabilité individuelle pendant que le président français, Emmanuel Macron, promet que personne ne fera faillite, j’aime le système suisse.

20 mars 2020

L’élaboration du budget, une arme politique redoutable

Filed under: 1. Lettre québécoise — vslibre @ 7 h 17 min
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Si la Suisse travaille avec des budgets annuels, au Canada, l’année fiscale court du 1er avril au 31 mars. C’est pourquoi nous vivons ces derniers temps la présentation des budgets par les différents paliers de gouvernement. Le Québec a fait cet exercice le 10 mars dernier, le Canada présentera le sien d’ici la fin du mois. À la différence de la Suisse, cet exercice est ici un moment qui appartient totalement à l’exécutif.

« Les finances publiques sont saines ». Le premier ministre du Québec, François Legault a le sourire pour sa deuxième présentation du budget. Son gouvernement a les moyens de satisfaire bien des demandes et est prêt à relever les défis des changements climatiques et de la création de richesse.

Toujours avec des chaussures de circonstance

Tradition oblige, le ministre des Finances du Québec, Éric Girard a rencontré la presse la veille du dévoilement du budget. Innovation cette année, la discussion a tourné autour de ses patins à glace. De vieux patins, mais avec des lames haut de gamme neuves pour être « bien solide sur ses patins ».

Comme le veut la tradition, le ministre des Finances du Québec annonce toujours ses couleurs à la veille du dépôt d’un budget en achetant une nouvelle paire de chaussures. Pour l’occasion en 2020, Eric Girard s’est plutôt présenté devant les journalistes avec ses patins… munis de nouvelles lames. Photo : La Presse canadienne/Jacques Boissinot

Ça vous semble saugrenu. Il faut savoir qu’au Québec, comme au Canada, la tradition des chaussures du ministre des Finances est importante. En 2019, le ministre Girard avait dévoilé des chaussures de sport fabriquées au Québec pour « dépasser l’Ontario » comme le voulait son gouvernement.

Souliers neufs signes d’un budget prospère ou souliers usagés, ressemelés pour montrer qu’on doit se serrer la ceinture; tout a été vu ces dernières années. Mais d’où vient cette tradition ? – Si Jacques Parizeau, un ministre des finances emblématique du Parti québécois qui deviendra premier ministre en 1994, déclarait à Radio-Canada en 1990 que cette coutume remontait au 19e siècle et qu’il l’avait respectée scrupuleusement de 1976 à 1984 lorsqu’il gérait les finances du Québec, il avait tort. Aucune trace de cette tradition en Angleterre.

Selon les recherches de la Bibliothèque du Parlement, la coutume canadienne de porter des chaussures neuves semble être assez récente, mais son origine reste mystérieuse. Une chose est sûre, elle est moins présente à Ottawa qu’à Québec.

Un exercice de communication publique

Si la question des souliers est anecdotique, elle démontre quand même que de ce côté-ci de l’Atlantique, le dévoilement du budget est un moment important de la vie politique. Elle sert à faire passer le message du gouvernement, à montrer à la population qu’il est fidèle à ses promesses électorales.

Dans le système politique canadien, issu du parlementarisme anglais, c’est l’exécutif qui a la majeure partie du pouvoir, pour ne pas dire tout le pouvoir. Quand un gouvernement est majoritaire, il peut faire à peu près ce qu’il veut. Il faut savoir que les ministres sont aussi députés. Ils siègent et votent non seulement au Conseil des ministres, mais aussi à l’Assemblée nationale. Quand un parti a la majorité absolue des voix au Parlement et qu’une grande partie de ses députés sont ministres ou adjoints de ministres, il ne reste pas grande place pour une contestation du législatif.

L’Assemblée nationale du Québec a la même forme que la Chambre des communes à Londres, pas de différences entre les ministres et les députés, certains jouent les deux rôles. Photo : La Presse canadienne/Jacques Boissinot

Si le gouvernement est minoritaire, comme c’est le cas actuellement à Ottawa ou dans la province du Nouveau-Brunswick, par exemple, la présentation du budget est un moment sensible, car le gouvernement peut tomber à cas de refus par le législatif. C’est ce qui s’est passé en 2014 au Québec.

Minoritaire le Parti québécois de Pauline Marois avait présenté un budget refusé par tous les autres partis. « Vous venez d’assister au lancement d’une campagne électorale », avait déclaré le chef de l’opposition officielle. La première ministre n’avait pas eu d’autre choix que de déclencher des élections qu’elle perdra d’ailleurs.

En Suisse, le législatif a un rôle plus important.

Je me souviens qu’à l’époque où j’étais un parlementaire valaisan, la préparation de la session du budget ne me passionnait pas trop. Toutes ces lignes du pavé présenté par le Conseil d’État à éplucher étaient plutôt rébarbatives. Et pourtant, tout le pouvoir politique est là !

C’est bien beau de rédiger des lois judicieuses, claires, utiles et qui reflètent nos opinions, mais si elles n’ont pas le financement qui va avec, elles tombent un peu à plat. Alors que si un projet précis est financé dans un coin bien caché du budget, il suivra son cours et déploiera discrètement, mais efficacement son effet.

La vraie politique est là, dans les lignes budgétaires. Les parlementaires les plus habiles le savent, c’est à ce moment que des politiques efficaces se préparent ou se consolident. Les exécutifs n’aiment pas qu’on modifie leurs propositions. Ils veulent garder la main sur leur budget, car ils savent aussi que le pouvoir est là.

Suisse, Canada ou Valais, Québec, deux systèmes très différents, deux manières de gérer le budget, deux visions différentes de l’organisation politique, mais, au final, un même constat, il faut de l’argent pour concrétiser ses visions politiques.

13 mars 2020

La grande peur du coronavirus qui fait trembler le monde

Filed under: 1. Lettre québécoise — vslibre @ 6 h 35 min

S’il est bien un sujet incontournable et universel depuis quelques semaines, c’est bien le coronavirus ou plus scientifiquement le COVID-19. Cette nouvelle maladie détectée pour la première fois en Chine en décembre 2019 n’en finit plus de faire peur. Ses conséquences tant humaines qu’économiques ne sont pas encore clairement mesurables, mais plus rien ne sera plus comme avant tant sur le plan sanitaire que sur celui des échanges internationaux.

« Les premières personnes malades qui ont été associées à cette éclosion ont développé leurs symptômes à la suite d’une exposition à un marché de fruits de mer et d’animaux vivants situé dans cette ville. La source exacte de l’exposition dans ce marché demeure inconnue. Ce marché a été fermé le 1er janvier 2020. Depuis, une transmission personne à personne a été confirmée et le virus a été retrouvé dans de nombreux pays dans le monde. » Les explications des origines du mal, tirées du site officiel du gouvernement du Québec (quebec.ca) sont claires.  

Le Canada moins touché

Le Québec, tout comme le Canada dans son entier, est beaucoup moins frappé que la Suisse, mais la panique est grande pour une partie de la population. Si on n’arrive pas aux absurdités du voisin du sud où la marque de bière Corona a vu ses ventes baisser significativement à cause de son nom, le premier ministre Trudeau a quand même dû intervenir pour rassurer.

« Il n’y a pas de place dans notre pays pour la discrimination nourrie par la peur et la désinformation », a lancé le premier ministre à l’occasion du Nouvel An chinois. Il a dû répéter son message à plusieurs reprises. La peur a fait ressortir la stigmatisation de certaines populations, des relents de racisme ou encore des commentaires hostiles aux communautés les plus touchées dans le monde.

Contrairement à la Suisse, le pays n’a pas encore eu besoin d’annuler de nombreuses manifestations ou d’interdire les grands rassemblements. La LNH joue toujours et j’ai visité dernièrement le Salon de l’auto de Québec. Mais les entreprises commencent à être inquiètes. Des pièces détachées manquent et le ralentissement du marché chinois, important pour le Canada, n’augure rien de bon.

La Chine, l’Iran, puis le cœur de l’Europe

La Chine d’où est parti le virus a bien tenté de circonscrire la maladie. Elle a confiné des millions de personnes comme seule une dictature peut le faire. Elle a construit un hôpital en dix jours pour bien montrer ses capacités infinies, mais, au final, le mal a été plus fort qu’elle. Le CVID-19 réussira peut-être là où personne n’avait encore réussi : à faire plier le géant jaune.

L’Iran a été ensuite la proie du coronavirus. Après l’assassinat du chef militaire Qasseim Soleimani par les Américains et l’énorme erreur qui a fait abattre un avion ukrainien où de nombreux Canadiens ont perdu la vie, le régime a failli une fois de plus en perdant la maîtrise du nouveau virus. Personne ne sait encore quel sera l’effet dans le pays de cette gestion calamiteuse de la crise.

La Corée du Sud est aussi fortement touchée et ici, au Québec, on a suivi avec attention la quarantaine du Diamond Princess au Japon. Un isolement qui fut finalement un fiasco. Puis ce fut le tour de l’Europe avec l’Italie, la France et la Suisse de se voir frappé par le nouveau mal. L’Italie semble avoir mal géré les premiers cas dans les hôpitaux entraînant la propagation en Europe centrale.

Et maintenant qu’adviendra-t-il ?

En écoutant Alain Berset expliquer les mesures draconiennes prises dès que la Suisse a identifié les premiers cas, je me suis dit que mon pays d’origine en faisait trop. Annuler le Salon de l’auto, interdire les spectateurs pour les matchs de football et de hockey me semblait exagéré. Et pourtant, le mal a continué à se propager. Comment s’arrêtera-t-il ? 

Je ne suis pas en mesure de le savoir, mais le COVID-19 marquera l’histoire médicale mondiale. Certes, ce n’est ni le SIDA ni l’Ebola. Pour l’instant, il semble surtout atteindre fatalement des personnes déjà à risque et affaiblies. Mais, contrairement à l’Ebola, les riches occidentaux (pensons aux clients du Diamond Princess) ne sont pas épargnés.

Cette maladie fait vaciller l’économie mondiale. Soudain, la mondialisation apparaît comme un facteur aggravant. Wall Street vacille. La banque centrale américaine abaisse ses taux pour enrayer la chute, mais rien n’y fait. La seule bonne nouvelle est la baisse de la pollution en Chine suite à la fermeture des usines.

Il faut bien sûr espérer que nous surmontions au plus vite cette crise, mais elle doit être aussi prise comme un avertissement. La mondialisation a apporté beaucoup de bien, j’en suis convaincu, mais elle a aussi engendré des excès. Les échanges mondiaux font plus de bien que de mal, mais on a atteint un plafond. Comme les gaz à effet de serre, le COVID-19 est une remise en question sérieuse du fonctionnement globalisé. Saurons-nous en tirer les leçons ?

6 mars 2020

Du suicide assisté à l’aide médicale à mourir

Filed under: 1. Lettre québécoise — vslibre @ 8 h 00 min

La semaine prochaine, le Grand conseil se penchera sur la 2e lecture de la Loi sur la santé. L’article 18 a ne manquera pas, une nouvelle fois, de soulever les passions. Le sujet est délicat et universel. Quoi de plus universel et inéluctable que la mort ? Au Canada, on ne parle pas d’assistance au suicide, mais d’aide médicale à mourir. Mais le débat est tout aussi polarisant.

« L’assistance au suicide représente une liberté individuelle et que toute personne capable de discernement peut faire valoir cette liberté », le désormais célèbre article 18 a, accepté du bout des lèvres en première lecture, car une proposition de suppression a été refusée par 69 voix contre, 56 pour et 4 abstentions, implique que les hôpitaux ou les homes ne peuvent priver un patient de cette liberté.

La députée du Parti québécois Véronique Hivon est celle qui a piloté le projet de loi sur l’aide médicale à mourir au Québec. Elle a dirigé un débat respectueux et consensuel. PHOTO : PQ.org

Le 9 mars prochain, les députés se pencheront à nouveau sur le projet de loi et cet article va, bien évidemment, être au centre des débats. Comme cette question est universelle, je vous propose de voir comment elle est traitée au Canada et au Québec.

Intervention de la Cour suprême du Canada

Le Code criminel canadien condamnait un médecin ou un proche qui aidait un patient à mettre une fin définitive à ses souffrances. La Cour suprême a jugé, en février 2015, que le Code criminel contrevenait à la Charte canadienne des droits et libertés qui dit à son article 7 : « Chacun a droit à la vie, à la liberté et à la sécurité de sa personne; il ne peut être porté atteinte à ce droit qu’en conformité avec les principes de justice fondamentale. »

Les dispositions qui interdisaient l’aide médicale à mourir ne seraient donc plus valides. Conformément à l’arrêt de la Cour suprême, le gouvernement fédéral avait jusqu’au 6 juin 2016 pour créer du droit nouveau. Ce qu’il fit le 17 juin 2016 en modifiant le Code criminel dans le sens demandé par la Cour suprême.

Au Canada, on ne parlera pas d’assistance au suicide, mais d’aide médicale à mourir. Ainsi, depuis lors, les médecins aidés par les pharmaciens ou encore des proches de la personne concernée peuvent fournir une aide médicale à mourir. La loi, pour protéger les croyances du personnel de la santé, n’oblige personne à participer au processus d’aide médicale à mourir. Parmi les différents critères demandés pour obtenir cette aide si le consentement éclairé, la demande préalable, les capacités mentales ou l’âge minimum de 18 ans font relativement consensus, la notion de « mort naturelle raisonnablement prévisible » fait débat.

Jean Truchon et Nicole Gladu sont atteints de maladies dégénératives incurables. C’est leur recours devant la Cour supérieure du Québec qui a fait évoluer la loi sur l’aide médicale à mourir en 2019. PHOTO ALAIN ROBERGE, ARCHIVES LA PRESSE

Le Québec comme précurseur

Le 11 septembre 2019, la Cour supérieure du Québec a statué que le critère d’admissibilité d’une « mort naturelle raisonnablement prévisible » dans le Code criminel, ainsi que le critère « en fin de vie » de la Loi concernant les soins de fin de vie du Québec, étaient inconstitutionnels. Cette nouvelle décision de justice remettait sur le devant de la scène un débat jamais véritablement clos.

Une fois de plus, le Québec qui avait devancé le gouvernement fédéral en 2015 en instaurant une Loi sur les soins de fin de vie après un large débat où les partis politiques avaient accepté, pour une rare fois, de travailler main dans la main faisait œuvre de pionnier. Depuis, les critères d’admissibilité à l’aide médicale à mourir sont revus tant au Québec qu’au Canada.

Quels droits pour les victimes de maladies incurables ? Comment traiter la question des maladies comme l’Alzheimer et le consentement préalable nécessaire ? Quoi faire avec les maladies mentales ? Faut-il encourager les alternatives médicales ou autres ? – Les questions sont multiples et le débat quasi permanent.

Quand on touche à notre finitude

« En effet, si l’euthanasie et l’aide au suicide peuvent être des gestes à légaliser, la fin de vie dépasse ces deux seuls gestes. Ainsi, remettre en question les soins de confort et de soutien, autant pour ceux dont la mort est imminente que pour ceux dont la fin est inéluctable, mais lointaine, fait partie intégrante du débat. Comme revoir l’offre de soins, notamment la dispensation des soins palliatifs et les soins à domicile, sans oublier les soins non médicaux tels les psychothérapies, le soutien qui peut être apporté au plan spirituel, les réseaux sociaux. Ou repenser collectivement les notions de souffrance, de maladie, de handicaps et de mort. »

Ces mots tirés de la conclusion d’un rapport datant de 2010 de la Commission québécoise de l’éthique, de la science et des technologies résonnent toujours avec pertinence. Même si la législation a fait du chemin, rien ne pourra jamais être définitif dans un domaine qui touche de si près l’essence même de notre existence.

Dans ce débat, comme l’ont bien compris les partis politiques québécois, chacun doit être libre de se prononcer selon sa conscience, ses croyances, son vécu et sa vision de la vie. 

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